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Nouvelle Feuille
15 novembre 2008

Der des Der (VI)

Orages d'acier, de Ernst Jünger

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"Plus qu'une apologie du militarisme comme on l'a trop souvent dit, "Orages d'acier" est plutôt l'oeuvre lucide d'un observateur attentif et minutieux qui voit la guerre comme il voit les insectes (il était passionné d'entomologie), à la loupe, mais avec peu de sentiments.
On a tout de même un peu l'impression que Jünger n'a pas fait exactement la même guerre que Barbusse, Dorgelès, Remarque et consorts. Car si il a aussi subi les bombes et les tranchées, il était gradé, ce que n'étaient pas les autres. Mais sa façon de décrire permet une chose que ne permettent pas les autres livres : de suivre l'évolution de la guerre. Car Jünger a fait toute la guerre, de 1914 à 1918, et pas seulement une partie ou une période. On voit la progression de la guerre, qui passe insensiblement de la dernière guerre ancienne, celle où les lauriers pouvaient se cueillir sur les charniers, à la première guerre moderne, dans laquelle sont englouties des générations d'hommes.
On voit aussi clairement l'internationalisation de la guerre. En effet, en 4 ans de guerre franco-allemande, Jünger combat des Anglais, des Ecossais, des Hindous, des Néo-Zélandais, mais assez peu de Français.
Mais je crois que l'intérêt essentiel réside dans le fait que la guerre est vue par un gradé, et pas par un poilu de base. C'est la grande différence de Jünger (assez élitiste, il faut le reconnaître) et les autres, aux oeuvres beaucoup plus populaires.
Mais cela reste un témoignage intéressant, sinon essentiel, sur la Grande Guerre, porté par une langue belle et travaillée."

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Extraits:
"Les alentours étaient parsemés d'autres cadavres par douzaines, pourris, calcinés, momifiés, figés dans une inquiétante danse macabre. Les Français avaient dû tenir des mois auprès de leurs camarades abattus sans pouvoir les ensevelir."

"Non sans un certain frisson, je me souviens que durant cette collation, je tentai de dévisser un drôle de petit appareil, trouvé à mes pieds sur le sol de la tranchée; je crus reconnaître, Dieu sait pourquoi, une «lanterne d'assaut». Bien plus tard seulement, je devais comprendre que l'objet que j'avais tripoté était une grenade dégoupillée."

"Je crois avoir imaginé une analogie qui rend fort bien le sentiment propre à une situation où je me suis trouvé souvent, comme tous les autres soldats de cette guerre: qu'on se représente ligoté à un poteau et constamment menacé par un bonhomme qui brandit un lourd marteau. Tantôt il arrive en sifflant, vous frôlant le crâne, puis il frappe le poteau si fort que les éclats en volent — c'est exactement cette situation que reproduit tout ce qu'on subit quand on est pris à découvert en plein milieu d'un pilonnage."

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