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Nouvelle Feuille
10 avril 2011

Lyon (VI): Dernier jour, dernier musée...

 Et puis, enfin, le dernier jour se leva. L'hôtel nous garde les valises tandis que nous allons vers le musée des Tissus. Avant la visite de ce musée proprement dite, nous faisons un petit tour dans les rues adjacentes. Ce secteur a longtemps été le lieu de nombreux établissements et congrégations religieuses, qui ont peu à peu fini par vendre leurs terrains. Elles ont tout de même quelques beaux restes disposés autour de la basilique Saint Martin d'Ainay. 

Basilique_St_Martin_d_Ainay

(Façade de la basilique d'Ainay)

 

Cette belle basilique donne une belle impression d'unité romane malgré les remaniements du XIXe s., qui sont parvenus à ne pas briser cette unité globalement romane. Jusqu'aux travaux de Perrache à la fin du XVIIIe s., la basilique dominait le site de confluence (confluence repoussée plus au sud à cette époque).

Tympan_roman 

(Petit tympan roman)

 

A l'intérieur, plusieurs éléments méritent d'être remarqués. Tout d'abord les colonnes monolithes séparant la nef des collatéraux, qui sont des réemplois de colonnes romaines. Puis la chapelle et la crypte de Sainte Blandine, de style pré-roman. Et enfin et surtout les superbes chapiteaux romans du XIIe s., magnifiquement conservés. 

Chapiteau_roman

(Chapiteau roman : L'offrande de Caïn et Abel, Saint-Michel terrassant le dragon)

 

Très particulière, cette église mérite d'être visitée et constitue un beau témoignage d'art roman dans la région lyonnaise.

Basilique_St_Martin_d_Ainay__2_

(Basilique Saint Martin d'Ainay, vue de l'arrière)

 

Nous entamons ensuite, en fin de matinée, la dernière visite de notre long séjour : celle du musée des Tissus. Installé dans un très grand hôtel particulier du XVIIIe s., il s'agit en fait de deux musées distincts : celui des Tissus et celui des Arts décoratifs. Nous visiterons le premier mais le temps nous manquera pour voir le second; nous renoncerons donc, ce sera pour une prochaine fois.

Le musée des Tissus est organisé de façon plus ou moins chronothématique. Inutile de le préciser à chaque fois : toutes les sections sont riches et présentent des pièces exceptionnelles.

Un grand nombre de tissus coptes sont présentés, pour l'essentiel provenant d'Antinoé, en Egypte; ainsi que plusieurs samits byzantins.

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(Carré, cycle des saisons, Tapisserie appliquée sur toile de lin, Antinoé, Ve-VIe s.)

 

La médiation mise en oeuvre dans ce musée est assez sympathique et bien foutue : intelligente et pas envahissante, à l'instar de ce petit placard aux tiroirs numérotés de 1 à 4. Dans chaque tiroir, un tissu (soie, laine, lin, coton) et des feuilles symbolisant ces différentes matières. Le jeu est plutôt amusant, que l'on soit enfant ou plus âgé.

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(Une médiation intelligente, ce n'est pas si courant!)

 

Une vaste section évoque des tissus "orientaux", provenant essentiellement du monde arabo-musulman. Quelques tissus rares, anciens et abimés, comme ce suaire espagnol du XIe s. :

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(Suaire de Saint-Lazare (cathédrale d'Autun, Bourgogne), Espagne, XIe s. Taffetas brodé.)

 

La partie consacrée à la Perse safavide est superbe et évoque la qualité du travail local de la soie à travers plusieurs tapis et tapisseries, mais aussi par des manteaux et caftans des XVIIe et XVIIIe s. 

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(Scène de chasse, Perse, XVIIIe s., Soie)

 

Tout autant que l'énorme fabrication de toiles peintes en Inde (ce qu'en Europe on appelera justement des "indiennes"). J'ignorais que l'Inde exportait son travail vers d'autres marchés que l'Europe, mais visiblement c'était le cas et les artisans savaient adapter leur travail aux attentes des clients quelle que soit la région où ceux-ci vivaient.

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(Toile peinte et imprimée, Inde, XVIIIe s., Coton)

 

Le tour d'horizon du monde islamique est vraiment très large. Après les débuts de l'Islam et les régions de la Perse et l'Inde, c'est le monde ottoman et ses multiples inspirations (Asie centrale, Chine, Europe) qui est abordé.

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(Tissu à décor de tchintanami, Turquie, XVIe s., Soie)

 

La grande salle centrale du musée présente de grands et beaux tapis mais on ne peut que déplorer la nullissime exposition qui s'y étale. Consacrée à faire de la publicité aux marchands de rouge à lèvres de la ville, elle présente le double désavantage d'être sans intérêt, ce qui en soit n'est pas dramatique, mais surtout d'avoir ses vitrines disposées de telle façon qu'elles rendent impossible la lecture des cartels et empêchent de s'approcher correctement des tapis. Bref, c'est nul, surtout que dans une salle aussi grande, il aurait semblé mille fois plus intelligent de placer les vitrines au centre et ainsi de permettre une circulation correcte des visiteurs. 

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(Salle des tapis)

 

Dans le salon de Psyché, une exposition temporaire évoque le mythe d'Amour et Psyché sur divers supports textiles, depuis le tissu copte jusqu'à la toile de Jouy. 

Salon_de_Psych_

(Salon de Psyché)

 

Ce thème est même décliné sur une superbe robe à médaillons du XVIIIe s.

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(Robe à l'anglaise, Taffetas brodé, 1780)

 

Dans l'autre salle d'exposition temporaire, plus vaste, est évoquée la soierie lyonnaise et notamment ses innovations techniques, mais dans le cadre des présentations réalisées par les industriels de la ville aux diverses expositions universelles. Scientifiquement, l'ensemble est tout à fait bon, mais le propos est parfois franchement austère surtout quand on n'est pas vraiment spécialiste du textile et de ses techniques. 

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(Mise en carte du dais de N-D de la Salette et dais en question, Lyon, 1878. Présenté à l'Exposition Universelle de Paris en 1878)

 

La visite se poursuit à l'étage avec une énorme collection de textiles italiens et espagnols de la fin du Moyen Age et de l'ensemble de l'époque moderne. 

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(Panneau à décor animalier et végétal, Sicile, XIVe s.Taffetas, soie)

 

Notamment pour ce qui concerne la section italienne, les vêtements liturgiques sont omniprésents et superbes, la plupart du temps imposants, lourds, chargés de fils d'or et taillés dans les tissus les plus recherchés... C'est toute la puissance de l'Eglise qui se montre à travers les habits de ses serviteurs. 

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(Dalmatique, Italie, XVIe s. Damas broché, soie et fil d'or, doublure en taffetas de soie, galons en soie filée d'or et d'argent)

 

Petit coup de coeur parmi toutes ces richesses pour ce tissu espagnol à décor animalier, sans doute moins riche que les lourds habits liturgiques, mais tout à fait charmant. A noter que cette section du musée offre une belle vue sur la salle des tapis turcs évoquée plus haut.

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(Fragments à décor animalier, Espagne, XVIe s., damas base satin)

 

Une salle attenante, plus petite, est consacrée aux textiles d'Asie orientale. Les collections sont très belles mais moins riches, bien que couvrant la plupart des zones géographiques et des techniques de la région. Si la majorité des pièces sont japonaises, les zones indianisées, comme l'Indonésie, ne sont pas oubliées. Là-bas, comme souvent dans ces pays, on représente les grandes épopées indiennes : le Ramayana et le Mahabharata. 

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(Tenture représentant des scènes du Mahabharata, Indonésie, Bali, XIXe s., Fabriqué en Inde ou à Bali, Toile de coton peinte)

 

Quelques robes chinoises sont également présentées (l'Inde n'est pas absente, mais elle est plutôt exposée dans les salles sur le monde islamique). Néanmoins, les plus belles pièces sont japonaises et sont liées au théâtre traditionnel.

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(Gilet de théâtre pour un rôle de moine, Japon, fin XIXe s., Soie)

 

Il nous faut ensuite repasser par la section Italie/Espagne pour rejoindre  celle des tissus européens du Moyen Age, essentiellement français à vrai dire. La pièce majeure de la section est la première présentée; il s'agit de l'exceptionnel pourpoint de Charles de Blois, un costume superbe habit bien rembourré, composé de 32 pièces d'une étoffe somptueuse, un lampas de soie tissé sans doute en Irak ou en Iran. 

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(Pourpoint de Charles de Blois, France, fin XIVe s. pour le vêtement, Irak ou Iran, XIVe s. pour le tissu. Lampas, doublure en lin, rembourrage en ouate de coton)

 

Les tissus médiévaux présentés sont d'une très grande qualité et pour la plupart dans un état de conservation admirable.

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(Détail d'un pluvial aux symboles des quatre évangélistes, Allemagne du sud, XIIIe s. Toile de lin, broderie de soie)

 

 Les sections consacrées aux XVIIIe et XIXe s. sont très impressionnantes car elles exposent un grand nombre de costumes féminins notamment, qui permettent de suivre l'évolution des modes à travers ces époques. On est toujours émerveillé et effaré par les invraisemblables robes à panier.

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(Robe de cour, France, vers 1760. Soie, broderies)

 

Les vêtements masculins sont beaucoup moins nombreux et globalement moins étonnants, mais toujours taillés dans les tissus les plus précieux et selon les techniques nécessitant le plus de savoir-faire. 

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(Détail d'un habit d'homme, Lyon, vers 1770-1780)

 

Si le milieu du XVIIIe s. est une période d'extravagance totalement assumée, la fin de ce siècle et le début du suivant (période de l'Empire) se veut beaucoup plus sobre. Puis, peut-être sous influence anglaise ou américaine, les manches deviennent bouffantes, les tailles très serrées et les crinolines reviennent. Il faut ensuite redescendre au rez-de-chaussée pour achever la visite dans les quelques salles consacrées à la fin du XIXe s. et au XXe s.

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(Robes à manches gigot, robe et capeline, échantillons de tissu, France, vers 1835-1840. Taffetas de soie)

 

Même quand à la fin du XIXe s., l'on revient à des choses plus raisonnables, les festons sont toujours là et la taille engoncée dans des corsets improbables est toujours une constante.

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(Robe, France, vers 1885. Taffetas de soie)

 

La dernière salle expose des créations de grandes maisons de couture contemporaines, plus ou moins réussies et pas mal de modèles créés par des artistes, notamment Raoul Dufy. Elles témoignent de la grande qualité du travail lyonnais qui a su négocier le tournant du XXe s. en valorisant son grand savoir-faire pour se diriger presqu'uniquement vers le secteur du luxe.

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(Murmures, Lyon, d'après Paul Delvaux, 1979. Velours au sabre)

 

Nous renonçâmes donc, par manque de temps, comme je l'ai déjà indiqué, à visiter le musée des arts décoratifs. Après quelques petits tours de plus dans le quartier, nous rentrons vers l'hôtel et les atroces gares lyonnaises de Perrache et Part-Dieu, où retrouver son chemin est véritablement compliqué...

 

 

Au passage, puisqu'on parle beaucoup de robes dans cet article, je me permets cette digression pour faire un peu de pub pour Mademoiselle Mars, une spinalienne qui réalise de bien belles choses et que je vous recommande chaudement en cas de besoin d'une robe sur mesure plutôt sympa...

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(Robe à motifs toile de Jouy)

 

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