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Nouvelle Feuille
17 avril 2013

Les Bohèmes, ça ne veut rien dire du tout...

Parmi les deux grandes expos de l'hiver au Grand Palais, il y avait celle intitulée "Bohèmes" qui servait de dérivatif pour tous les frustrés qui poireautaient longuement pour entrer dans celle consacrée à Edward Hopper. 

Le titre était énigmatique et l'on pouvait bien se demander ce qu'on allait y trouver. Au final, ce n'est plus un secret, on se trouvait en face d'une exposition largement ratée. Pas au niveau de la qualité des oeuvres, indiscutable, mais au niveau du propos : quelle mouche a donc piqué le programmateur, le commissaire d'expo, le conservateur, qui sais-je! pour consacrer non pas une exposition aux Gitans, Manouches, Bohémiens et autres Roms, pas non plus à la "vie de Bohème" et à ses artistes, mais aux deux sujets à la fois, retenus par un lien qu'on peut qualifier d'extrèmement ténu? Et encore, l'espace devait être assez rempli et nous avons évité de nous trouver face à une troisième partie qui aurait mêlé des portraits de la cour des Habsbourg à Prague et du cristal de Bohème... Bref. Indépendamment de cet énorme défaut structurel, il y avait quand même pas mal de choses à sauver et de réflexions intéressantes qui auraient mérité de plus s'y attarder, quitte à faire moins spectaculaire et moins décousu.

Gros point positif en revanche, qu'il convient de signaler : la possibilité de prendre des photos. Un vrai bonheur.

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(Vue d'ensemble de la première partie de l'exposition)

 

La première partie est à mon sens la plus intéressante et celle qui cède le moins aux facilités scénographiques. Elle est consacrée à l'image des Roms dans l'art européen. Quelques soient leurs noms successifs, ceux qu'on appelle aujourd'hui Roms sont arrivés en Europe à partir du XII-XIIIe s. et se sont lentement diffusés sur le continent, en conservant leur mode vie nomade ou semi-nomade. Bien évidemment, cette nouvelle population, arrivée pacifiquement dans un monde européen lui-même en train de partir à la découverte du reste du monde, a suscité la curiosité, notamment chez les artistes. Assez rapidement, le Gitan est devenu un "type" de personnage, une figure roublarde, pas vraiment dangereuse mais un peu inquiétante.

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(Léonard de Vinci, Un homme trompé par des Tsiganes, vers 1493, Londres, Collections royales)



Le nom qui leur est le plus fréquemment donné est celui de Gitans, en anglais Gypsy, un terme dérivé du mot "égyptien" car l'on imaginait - allez savoir pourquoi - que ces populations sans doute originaires du sous-continent indien venaient de ce pays. A tel point qu'on leur applique souvent ce vocable d'Egyptien dans un grand nombre d'ouvrages, comme ce recueil de costumes du XVIe s. On remarque que le costume féminin typique des Gitanes est caractérisé par un immense chapeau rond, bien loin de l'image que l'on se fait de la gitane depuis les espagnolades du XIXe s. et les danses d'Esméralda...

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(François Déserps, Recueil de la diversité des habits, L'Egyptien, l'Egyptienne, 1562, Paris, Bibliothèque Mazarine)

 

La confusion a fini naturellement par se faire entre ces Gitans et tout ce qui était égyptien ou s'y déroulait. On vit ainsi se développer une iconographie de la Vierge habillée en Gitane, particulièrement pour figurer l'épisode de la fuite en Egypte!

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(Andrea Ansaldo, La fuite en Egypte, 1620, Gallerie Nazionale d'Arte Antica, Palazzo Barberini, Rome)

 

De rares artistes, surtout flamands, tentent un portrait plus naturaliste des Gitans, un peu à la manière des scènes de genre paysannes des frères Le Nain. 

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(Jan Van de Venne, Le campement de Bohémiens, XVIIe s., Marseille, Musée des Beaux-Arts)

 

L'autre face de ces "Egyptiens" et surtout des "Egyptiennes", c'est le côté roublard, voleur, tricheur qu'on leur prête. Toute une iconographie de la diseuse de bonne aventure. Le thème, plaisant est toujours celui d'un jeune personnage riche et naïf, qui se trouve aux prises avec des Gitanes enjôleuses qui lui lisent les lignes de la main tout en le détroussant pendant que son attention est distraite. Le contenu moral est évident : ne pas faire confiance aux promesses trompeuses, etc...

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(Nicolas Régnier, La diseuse de bonne aventure, vers 1626, Musée du Louvre)

 

La thématique est encore plus théâtralisée chez Georges de la Tour, où les protagonistes apparaissent presque comme des acteurs. Ici c'est une vieille Gitane avec laquelle le jeune homme fait affaire tandis que trois autres, belles et jeunes, le serrent de près en lui faisant les poches. C'est un vrai grand plaisir que de pouvoir admirer ce très beau de la Tour prêté par le MET de New-York et une belle réussite des commissaires d'expo que d'avoir obtenu une toile du maître lorrain. 

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(Georges de la Tour, La diseuse de bonne aventure, vers 1630, Metropolitan Museum of Arts)



Si le XVIIe s. fait un portrait peu rassurant des Bohémiens, l'on se rend compte au siècle suivant que leur image change déjà. Sans encore tomber dans l'espèce d'exotisme dont les affublera le XIXe s., l'inquiétude un peu vague qu'ils suscitent semblent s'estomper au profit d'une imagerie plaisante. Ici la Bohémienne ne détrousse plus, mais gagne quelques sous en lisant les lignes de la mains à quelques donzelles oisives. Toute la fourberie et le danger, la tension qui se trouvait chez De la Tour est effacée chez les suiveurs de François Boucher.

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(Ecole de François Boucher, La diseuse de bonne aventure, Musée national du château de Versailles)

 

Le pittoresque qui s'installe dans l'imagerie du Bohémien - qui pourtant semble toujours rester distincte de celle du Juif errant - donne parfois encore des oeuvres tendant au réalisme de la description plutôt qu'à la fantaisie ou au fantasme.

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(George Morland, Campement de Bohémiens, 1791, Musée du Louvre)



Grande découverte pour moi, c'est la figure du graveur Jacques Callot, le maître de l'eau-forte, qui a servi de catalyseur à la figure romantique du Bohémien au XIXe s. Comment diable un artiste lorrain du XVIIe pouvait-il inspirer au XIXe s.? Curieusement, c'est une anecdote, qui sent franchement le frelaté, qui voudrait que le tout jeune Callot, alors à Rome, se soit enfuit avec une troupe de Bohémiens et c'est de là que viendraient les quelques eaux-fortes traitant de ce sujet qu'on lui doit. Mouais... Toujours est-il que cet épisode, réel ou non, a inspiré un autre graveur lorrain, un certain Aimé de Lemud, qui en a donné sa version dans le style troubadour.

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(Aimé de Lemud, Enfance de Callot, 1839, BnF, Paris)

 

Et puis, le Romantisme fait son oeuvre et la Gitane n'est plus qu'une enjôleuse, extraordinairement sensuelle, toujours dangereuse. Et certaines toiles semblent sortir de "Notre Dame de Paris" de Victor Hugo : "Elle dansait, elle tournait, elle tourbillonnait sur un vieux tapis de Perse, jeté négligemment sous ses pieds ; et chaque fois qu’en tournoyant sa rayonnante figure passait devant vous, ses grands yeux noirs vous jetaient un éclair. Autour d’elle tous les regards étaient fixes, toutes les bouches ouvertes, et, en effet, tandis qu’elle dansait ainsi, au bourdonnement du tambour de basque que ses deux bras ronds et purs élevaient au-dessus de sa tête, mince, frêle et vive comme une guêpe, avec son corsage d’or sans pli, sa robe bariolée qui se gonflait avec ses épaules nues, ses jambes fines que sa jupe découvrait par moments, ses cheveux noirs, ses yeux de flamme, c’était une surnaturelle créature." 

Il est à noter que cette belle Gitane aux seins nus est aujourd'hui sur le marché de l'art (sauf achat récent) et qu'elle aurait toute sa place à Orsay...

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(Henri Regnault, La Gitane aux seins nus, 1869, Galerie Mendes, Paris)

 

C'est le croisement entre un certain "goût espagnol" de l'époque (et donc encore une fois, certains poèmes d'Hugo) et l'attrait pour l'exotisme, l'inhabituel qui transforme la figure du Gitan hérité de la période moderne en cette figure contemporaine du Gitan fier et ombrageux, de la Gitane provocante et libre. Une figure propre à quitter son rôle de péripétie du roman picaresque pour devenir le sujet central du drame romantique.

Le pittoresque est bien installé et l'imagerie du gitan a désormais changé, constituant par exemple - parmi d'autres espagnolades - une bonne partie de l'oeuvre du basque Achille Zo ou de l'orientaliste Alfred Dehodencq.

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(Alfred Dehodencq, Bohémiens en marche, 1869, Musée d'Orsay)

 

Et puis là, brutalement, alors que l'accrochage nous semblait pertinent et plutôt intelligemment choisi, on tombe sur le fameux "Bonjour Monsieur Courbet", une des pièces maîtresses du grand peintre. Et on se demande encore pourquoi on a jugé bon de trimballer depuis le musée Fabre de Montpellier jusqu'au Grand Palais un tableau qui ne nous dit à peu près rien du tout des Bohémiens... tout juste distingue-t-on une vague roulotte dans le fond du tableau et encore s'agit-il bien plus sûrement d'une malle-poste. Bref, à part la gloriole de pouvoir se vanter d'avoir sur ses cimaises un chef-d'oeuvre de Courbet, je n'ai pas vu l'intérêt. Tout juste aurait-il plus trouvé sa place dans la partie suivante consacrée à la Bohème artistique... C'est par contre un bonheur de voir ce petit dessin de Manet représentant un montreur d'ours.

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(Edouard Manet, Le montreur d'ours, 1862, BnF, Paris)

 

L'on constate que la plupart des artistes majeurs du XIXe s. ont traité ce thème des Bohémiens, avec une mention particulière pour Van Gogh qui choisit de prendre le contrepied des scènes pittoresques à l'espagnole ou des petits métiers typiques, en peignant seulement un de leur campement assez misérable, aux environs d'Arles.

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(Vincent Van Gogh, Les roulottes, campement de Bohémiens aux environs d'Arles, 1888, musée d'Orsay)

 

Gros point très positif de cette fin de dernière partie : une vraie belle ouverture sur l'Europe centrale et orientale, où les Roms sont nombreux et bien entendu présents dans la peinture de ces pays, en particulier de la Hongrie. Dans ce pays, les Tsiganes sont présents dans la peinture de genre, mis en scène dans des représentations de la vie rurale, avec une évidente volonté de témoignage ethnographique. Ce genre de scène de genre - si j'ose dire - est apprécié jusqu'en très haut lieu, puisque le tableau ci-dessous a été acheté par l'empereur François-Joseph Ier.

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(Sandor Bihari, Devant le juge, 1886, Magyar Nemzeti Galeria, Budapest)

 

Et puis... et puis c'est tout. La présence dans l'art des Bohémiens, Tsiganes, Roms, Manouche et autres Gitans semble s'arrêter vers 1890-1900 si l'on se fie à ce qui est exposé. Rien de plus ensuite, il faut passer à l'étage par le grand escalier. Escalier dans lequel on découvre une colonne Morris couverte d'affiches de pièces et opéras ayant pour thème les Gitans et leur univers. Bien entendu on retrouve surtout des versions multiples de Carmen, mais soit, c'est plutôt sympathique même si ça n'apporte pas grand chose muséographiquement parlant. 

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(Colonne Morris, affiches)

 

La suite se gâte quelque peu et l'on a l'impression de passer dans une exposition totalement différente. Cette fois, c'est "la vie d'artiste", la "Bohème" au sens aznavourien, au sens "artiste maudit" pleine d'une vie de taudis et de liberté créatrice. Pourquoi pas, le sujet est intéressant même si l'accord avec le thème des Bohémiens est douteux. Personnellement, tant qu'à parler des Roms, pourquoi n'avoir pas poussé à fond le thème et proposé à l'étage une belle exposition d'ethnographie gitane? Sans doute l'art et les traditions populaires n'étaient-il pas assez nobles pour le Grand Palais. 

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(Accès aux salles d'expositions du premier étage)

 

Donc nous voilà embarqué dans un étage qui tente à force d'une scénographie très amusante pleine de clins d'oeil lourdingues, de nous faire comprendre ce qu'était un atelier/logement d'artiste à partir du milieu du XIXe s. Porte branlante, papiers peints déchirés, murs miteux, tableaux aux murs... pour un peu on se croirait dans le train fantôme...

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(Une scénographie subtile)

 

Malgré mon ton ironique, j'ai apprécié cette scénographie, très distrayante et plutôt réussie. Un peu trop en fait, car tout occupé que nous sommes à observer ce decorum, on en oublie un peu les oeuvres exposées, qui sont quand même le but premier de la visite. 

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(Les tableaux posés sur les chevalets. Pas idiot mais peu pratique pour regarder les oeuvres)

 

Et c'est regrettable, car les tableaux choisis sont plutôt intéressants, montrant tout à la fois ce qu'était un atelier d'artiste mais aussi la vision romantique très torturée que pouvaient avoir ces mêmes artistes de leur propre existence.

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(Jules Blin, Art, misère, désespoir, folie!, 1880, Musée des Beaux-Arts, Dijon)

 

Je ne sais pas ce qui a présidé à cette sélection, mais presque en contrepoint de ces oeuvres françaises qui montrent un artiste en proie aux tourments intérieurs et se promenant toujours en lisière de la folie, on a des oeuvres allemandes et autrichiennes qui utilisent cette même imagerie de l'artiste maudit et la vie d'atelier en général pour en tirer des scènes de comédie plutôt grotesque. 

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(Josef Danhauser, Scène comique dans un atelier de peintre, 1829, Musée du Belvédère, Vienne)

 

On peut apprécier l'effort fait par endroits pour sortir de l'évocation purement picturale, avec un morceau de la partition originale de La Bohème de Puccini. C'est toujours intéressant même si l'on y comprend pas grand chose comme c'est mon cas. Et l'on constate que pour cette scène précise de la mort de Mimi, le compositeur s'est fendu d'un petit griffonage d'une tête de mort en marge...

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(Giacomo Puccini, Partition originale de La Bohème, acte IV : la mort de Mimi, 1895, Archivio Storico Ricordi, Milan)

 

 En somme, la Bohème qui nous est présenté, c'est bel et bien celle décrite dans la chanson d'Aznavour : un monde fantasmé, fait d'insouciance, d'amour, de précarité matérielle et de rêve de gloire artistique. Le tout en prenant bien entendu les poses les plus rêveuses dans la lumière bleutée du soir. En somme, c'est une façon de vivre, qui écrit sa propre légende et suscite ses propres clichés dès sa naissance.

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(Charles Amable Lenoir, Rêverie, 1893, collection particulière)

 

Ces clichés amenant facilement la caricature, nous ne sommes pas surpris de retrouver dans cet exercice le maître en la matière : Honoré Daumier, qui croque les artistes en miséreux joyeux prompts à danser ou en voleur de chats pour avoir de quoi se nourrir...

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(Honoré Daumier, Le bois est cher et les arts ne vont pas, 1833)

 

Et au milieu de cette salle, le petit "détail en trop", un vieux poêle, histoire d'évoquer les moyens de chauffage parfois précaires pour ces habitants de chambres miteuses.

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(Où l'on imagine le scénographe arriver avec son poêle dans la main)

 

Mais tout cela est encore presque bon enfant si l'on compare avec la salle suivante, incontestablement la plus mauvaise de toute l'exposition. Déjà par son sujet : Rimbaud et Verlaine. Certes, ceux-ci vécurent, le temps de leur courte et orageuse liaison, la vie de Bohème. Mais c'est réduire à bien peu de choses leurs vies respectives que de ne voir que cet aspect. Bref, ça tombe comme un cheveu sur la soupe. Et je n'ose même pas m'étendre sur l'espèce d'immense tente noire qui occupe l'espace au milieu de cette salle plutôt vaste. On ne comprend pas ce que cela signifie, on ne voit rien de très passionnant comme oeuvre, ou plutôt que du très connu... L'intérêt m'a semblé nul, au sens premier du terme "nul".

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(Henri Fantin-Latour, Un coin de table, 1872, Musée d'Orsay)

 

Mieux vaut passer à la suite, plus sympathique, qui va explorer du côté des bistros, cabarets et autres lieux de perdition (bien que la prostitution ne soit pas vraiment évoquée) de la vie montmartroise.

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(Anonyme d'après Adolphe Léon Willette, Enseigne du cabaret Le Chat noir, 1881, Musée Carnavalet, Paris)

 

Les deux belles enseignes du Chat Noir et du Lapin Agile (dernier survivant des cabarets de Montmartre) sont également des grands classiques de l'imagerie du Paris de la Belle Epoque, mais il est toujours agréable de les revoir et d'en profiter, celles-ci ne semblant étrangement guère passionner les foules.

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(André Gill, Enseigne du cabaret Au lapin agile, vers 1875-1880, Collection du cabaret Au Lapin Agile, Paris)

 

Ici pour une fois l'élément de décoration "too much" est plutôt le bienvenu : il s'agit de tables et de chaises qui doivent rappeler les cafés parisiens (même si on ne peut rien y boire!). Et franchement, tout le monde en profite largement, il y a rarement autant d'espaces pour s'asseoir dans une exposition!

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(Tables et chaises pour boire sa petite absinthe)

 

C'est la section idéale pour retrouver, bien entendu, le petit Toulouse-Lautrec, qui nous peint ce monde des danseuses, des cabarets et des prostituées, dont il fait le sujet de portraits admirables à la fois érotiques et réalistes.

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(Henri de Toulouse-Lautrec, La grosse Maria, Vénus de Montmartre, 1884)

 

Les dégâts de cette vie oisive faite notamment de grandes quantités d'alcool sont également l'un des thèmes présentés ici, avec justesse comme chez Degas qui nous montre cette femme bien habillé, qui sombre tristement dans l'alcoolisme. A moins simplement que l'odeur du semi-clochard qui est assis à côté d'elle l'empêche de profiter de son absinthe.

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(Edgar Degas, Dans un café ou l'Absinthe, vers 1875-1876, Musée d'Orsay)

 

On atteint alors la fin de l'exposition, avec une petite salle et un long couloir qui ont été remplis de façon vraiment curieuse, en repartant sur le thème du rez-de-chaussée : les Gitans, que l'on mélange encore avec les thématiques montmartroises. 

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(Kees Van Dongen, La Gitane (La curieuse), vers 1911, Centre Pompidou, Paris)

 

On est plutôt dubitatif sur l'aspect "gitan" des oeuvres présentées. On a l'impression d'un commissaire d'expo qui a cherché dans les catalogues des grands noms des années 1910 à 1930 toute oeuvre qui comportait le terme "gitan" ou se déroulait dans un cabaret. C'est disparate, sans aucun fil directeur autre que les noms d'artistes connus.

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(Pablo Picasso, Au Moulin Rouge ou Le Divan japonais, 1901, collection particulière)

 

Et puis l'on finit l'expo par le long couloir qui évoque "La nuit des Roms" (la déportation par les Nazis) de façon hyper succincte. Quelques mots, vite fait, comme pour s'excuser de n'en avoir pas parlé avant et de n'avoir pas fait LA grande expo de synthèse sur les peuples tsiganes que l'on attendra encore longtemps à Paris, qui ferait le bilan de la vision des Roms par les sédentaires et des arts, traditions et discours des Roms sur eux-mêmes. Pour autant, les beaux portraits de tsiganes des Balkans réalisés par l'allemand Otto Mueller dans les années 1920 - et qui constituent l'essentiel de ce couloir sombre - sont plutôt intéressants. Mais on ne comprend pas bien en quoi ils évoquent d'une quelconque manière le génocide qui n'arrivera qu'une quinzaine d'années plus tard...

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 (Otto Mueller, Tsigane de profil, Album tsigane, vers 1926-1927, Brücke-Museum, Berlin)

 

Bref, on a une impression de grande déception quand on sort de là. L'impression de bonnes intentions sabordées, d'idées mal développées et surtout d'une utilisation presque "prétexte" du thème des Roms pour amener les gens à voir ce qui constitue le coeur du travail effectué : la scénographie douteuse du premier étage. Le bon équilibre entre la qualité indiscutable des oeuvres et celle du propos de fond n'est jamais totalement atteint.

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