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Nouvelle Feuille
11 juin 2009

Allons donc à London!

Mercredi, sept heures et quart du matin. Autant dire, l'aube livide... Le train démarre pour une petite virée impromptue d'une journée à Londres. Heureusement, même si la météo nous avait prédit la pluie, nous n'eûmes qu'un temps couvert et de rares épisodes de petite pluie. C'est déjà ça. Ou alors s'il a plut, c'est quand nous étions enfermés.

Deux heures plus tard, 8h30 heure locale, nous voilà débarquant à nouveau dans cette chère gare de Saint-Pancras au style si particulier.

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(La gare de Saint-Pancras, ou la quintessence du néo-gothique anglais)

Comme il est encore tôt, qu'aucun monument ou musée n'est encore ouvert et que nos petits yeux ont besoin d'être revitalisés avant de visiter quoi que ce soit, nous marchons quelques centaines de mètres et nous attablons au Starbucks sis juste en face de notre première cible: la British Library.

Dans ce bâtiment moderne mais en briques rouges tout de même, se trouve l'équivalent de notre Bibliothèque nationale. Sauf que les Anglais, moins casse-pieds que nous autres, permettent à nos petits yeux enfin réveillés et avides d'histoire et de livres rares de contempler quelques unes de leurs merveilles, dans le Trésor. Qui plus est, tout cela est accessible gratuitement!

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(British Library)

Bref, nous admirons ainsi, un peu pêle-mêle il faut bien le dire, mais conservés avec amour et respect, quelques textes et écrits majeurs de l'histoire et de la littérature. Nous avons donc pu voir de nombreux livres rares et superbes: une Bible de Gutenberg (1454-1455); de nombreux livres enluminés et peints, anglais mais pas seulement car la British Library conserve beaucoup d'ouvrages indiens, chinois et d'autres pays asiatiques ou moyen-orientaux; des partitions musicales originales, du XVe s. aux Beatles en passant par le Messie de Haendel, Mozart ou le Boléro de Ravel. Parmi les ouvrages littéraires, toute une section est consacrée à Shakespeare, écrivain national dont on possède de nombreux imprimés originaux mais très peu d'écrits...; on peut également voir les manuscrits originaux d'ouvrages de Jane Austen, Charlotte Brontë (Jane Eyre), Lewis Carroll (Alice au pays des merveilles, illustré par lui-même), Joseph Conrad (Lord Jim), Virginia Woolf (Mrs Dalloway), Harold Pinter ou Sylvia Plath et Ted Hughes. On y trouve également de superbes cartes géographiques et un florilège de superbes livres sacrés représentants la plupart des religions du globe (Christianisme, Bouddhisme, Sikkhisme, Hindouisme, Islam, Judaïsme, Jaïnisme et même Zoroastrisme!).

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(Evangéliaire de Lindisfarne, 715, British Library. Chef-d'oeuvre de l'enluminure et de la culture anglo-saxonne du début du VIIIe s.)

Mais aussi parmi les documents historiques les fameux carnets de Léonard de Vinci; le journal du capitaine Cook ou celui du capitaine Scott; le livre de bord du HMS Victory à bord duquel Nelson vainquit la flotte française à Trafalgar. Et bien sûr, dans une salle à part, se trouve le trésor des trésors de la British Library: la Magna Carta, précieuse charte de 1215 par laquelle Jean Sans Terre accorde des libertés à ses barons révoltés, texte qui marque un premier pas dans la conquête anglaise des libertés.

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(Magna Carta, British Library)

Bref, la British Library est un endroit merveilleux mais qui semble peu connu. Comme en plus elle se trouve à deux pas de la gare "où arrivent les Français", elle doit devenir un incontournable des visites à Londres! Et ça vaut vraiment le coup, même si on n'est pas un fan absolu d'histoire ou de littérature.

Sur ces entrefaites, il n'est déjà pas loin de midi et nous nous dirigeons dare-dare vers le British Museum afin d'aller vers les buts initiaux de notre voyage, à savoir deux expositions qui s'y tiennent en ce moment. Un petit passage par le "jardin indien" qui se tient devant le musée pour la saison estivale nous permet d'entrevoir, sous un prétexte de thématique géographique, la diversité florale du sous-continent, passant sans souci des zones himalayennes aux régions tropicales. Dommage que le temps ait été si couvert, cela gâchait un peu une ballade restreinte mais agréable.

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(Jardin indien, British Museum)

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(Bambous et bananier, Jardin indien, British Museum)

Arrivé dans ce musée que nous commençons à connaître un tant soit peu, nous y mangeons rapidement puis commençons par l'exposition consacrée à Shah Abbas, shah d'Iran issu de la dynastie Safavide, qui régna à la fin du XVIe et au début du XVIIe s. Son règne marqua une période de splendeur et de prospérité pour la Perse.

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(Shah Abbas, portrait attribué à Bishn Das, 1618. Portrait réalisé pour l'empereur moghol Jahangir)

On découvre ainsi, dans un ordre à la fois chronologique et thématique, la vie et l'oeuvre de ce dirigeant majeur, le tout toujours vu en relation avec un contexte plus large, que ce soit sur le plan culturel, économique ou religieux. On découvre ainsi que Shah Abbas n'a laissé que très peu de portraits de lui, tout au plus quelques miniatures. On explore ainsi, après une mise en contexte, dans un premier temps les réalisations architecturales qu'il a fait exécuté pour sa capitale, Ispahan; puis suivent divers exemples des grandes réalisations artistiques persanes, notamment dans les domaines de la calligraphie, la miniature et la porcelaine. Les rapports avec le reste du monde sont constamment évoqués, qu'il s'agisse de l'influence et la diffusion des porcelaines chinoises, des rapports commerciaux et militaires avec les Anglais et contre les Portugais (prise d'Ormuz), ou encore des relations de bon voisinage avec les Moghols et de voisinage exécrable avec les Ottomans (Shah Abbas cherchant d'ailleurs du soutien en Occident pour écraser les Turcs, ennemis communs des Perses et des Européens).

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(Shah Abbas et l'ambassadeur moghol Khan Alam, peinture indienne du Golconde, vers 1600)

Outre ce contexte international tumultueux, on évoque la vie à la cour de Shah Abbas, une vie raffinée, baignée de poésie et d'une tolérance religieuse relative. La religion occupe en effet une grande place dans sa vie. C'est lui qui fait du chiisme la religion officielle du pays et organise ce courant de l'Islam. Il développe divers lieux de pélerinage, les gâtant à grands coups d'offrandes et donations somptueuses. Ainsi l'exposition insiste fortement sur trois sanctuaires qui firent l'objet de donations importantes: Ardabil, le mausolée de l'Imam Reza à Mashhad et celui de Fatimah Ma'sumeh à Qom. Il y donne notamment des porcelaines chinoises, des tapis précieux brodés d'or et d'argent. Ces pélerinages demeurent parmi les plus importants du monde; celui sur le tombeau de l'Imam Reza (8e Imam du chiisme) attire chaque année 20 millions de personnes!

On insiste également sur les guerres qu'il a menées et qui ont permis à l'empire de s'étendre, notamment au détriment de l'Empire Ottoman, auquels sont arrachées les villes de Bagdad ainsi que Nadjaf et Kerbala, deux villes saintes du chiisme.

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(Portrait d'un jeune page lisant un livre de poésie, 1625, par Riza Abbasi, principal représentant de la miniature et la calligraphie à l'époque safavide)

Enfin on aborde la question de son héritage. Héritage direct d'abord, qui fut difficile, car cet empereur ami des arts et puissant prince était aussi légèrement paranoïaque. Etant arrivé au pouvoir en usurpant violemment le trône de son père incompétent, il craignait que le même genre de chose ne lui arrive; ainsi il fit tuer ou aveugler tous ses fils. Ce fut son petit-fils Safi Ier qui lui succéda, ouvrant pour l'Iran une longue période de déclin jusqu'à ce que la dynastie safavide soit détrônée par les Afghans en 1722. Héritage contemporain également, puisque la place de Shah Abbas dans l'Iran pré-Révolution islamique jusqu'à aujourd'hui est rapidement évoquée en fin de parcours.

Au final, une exposition très intéressante qui nous resitue bien un personnage majeur et méconnu de l'histoire mondiale.

Seconde expo ensuite, toujours au même endroit. Celle-ci est consacrée à la peinture indienne de la cour de Jodhpur. Jodhpur est, du XVIIe au XIXe une principauté du nord de l'Inde, de religion hindoue mais vassale du puissant empire moghol. Néanmoins, comme dans nombre de petites souverainetés de ce genre, un art de cour assez florissant se développe. C'est cet art qu'entreprend d'explorer cette exposition, en l'observant à travers un même type d'oeuvre (la peinture miniature de cour) tout au long de la période. On constate que chaque souverain important initie alors des changements thématiques majeurs.

Ainsi pour le premier par ordre chronologique, Bakhat Singh (règne 1725-1751) , la vie semble avoir été plus consacrée à s'écouler tranquillement en profitant de tous les plaisirs offerts qu'à autre chose. On le voit donc, le plus souvent entouré d'une myriade de jeunes femmes, en train de se baigner, d'observer des jeux, de s'amuser de multiples façons. Celui-ci semble avoir vécu une vie douce et voluptueuse peu consacrée aux questions complexes et pénibles que requièrent la gestion d'un Etat.

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(Bakhat Singh au bain)

Le second, Vijai Singh, qui règne de 1752 à 1793, est déjà nettement moins primesautier. Très dévot, il s'emploie à faire peindre des épisodes de la vie des dieux Krishna et Rama, notamment en faisant illustrer le Ramayana et le Baghavata Purana. Néanmoins, cela reste très joli et assez compréhensible pour peu qu'on se donne la peine de vouloir comprendre les épisodes représentés.

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(Episode du Ramayana: la traversée vers Lanka)

Le troisième et dernier souverain par contre, un dénommé Man Singh (1803-1843), se place quant à lui sous des auspices bien plus difficilement compréhensibles. Et honnêtement, je n'ai rien pigé aux histoires de cette spiritualité des yogis Naths. Cela m'est absolument impénétrable et me paraît plutôt fumeux comme doctrine. Voici ce que donnent les peintures obtenues sous cette influence bizarre.

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(...)

Après tout cela, un passage à la librairie du musée, il était déjà temps de nous remettre en chemin vers la gare. Au passage nous nous fîmes un éphémère ami...

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(Un écureuil gris, mignon envahisseur des parcs anglais qui nuit beaucoup aux écureuils roux autochtones)

Prochain passage à Londres sans doute en janvier 2010, pour l'exposition consacrée à Moctezuma... et sans doute d'autres choses!

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R
After read blog topic's related post now I feel my research is almost completed. happy to see that.Thanks to share this brilliant matter.
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