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Nouvelle Feuille
12 décembre 2009

Un peu de Bhoutan à Paris

Le Bouthan est sans l'un des pays qui demeure parmi les plus mystérieux au monde. Certes, il s'ouvre au monde extérieur depuis une dizaine d'années, et l'on peut désormais y regarder la télé et l'occidental curieux et fortuné peut enfin aller y découvrir les dzongs perchés du pays qui mesure son niveau de vie en Bonheur National Brut. Bref, au-delà des clichés, on ne connaît rien sur ce pays qui nous paraît minuscule, coincé entre l'Inde et la Chine (mais qui a une superficie équivalente à celle de la Suisse tout de même).

C'est le grand mérite de l'exposition du musée Guimet (jusque fin janvier 2010) de nous permettre de découvrir un peu mieux l'art, l'histoire et la culture de ce pays. Et de constater, in fine, qu'à part le fait qu'il constitue un royaume indépendant, très peu de choses le distingue, culturellement et historiquement, de son voisin le Tibet.

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(Avalokiteshvara, XVIII-XIXe s., Talaka Gönpa)

Cette expo, organisée par l'Académie des Arts de Honolulu pour le centenaire de la dynastie régnante en 2008, est un pas important dans la connaissance de l'histoire de l'art de ce pays, encore mal connue et balbutiante. 2008 a aussi été l'année où le Bhoutan a changé de roi pour voir arriver à sa tête Jigme Khesar Namgyel Wangchuck, le plus jeune souverain au monde (même pas 30 ans).

Il faut savoir que le Bhoutan, sous l'influence culturelle directe du Tibet, pratique le bouddhisme tantrique (Véhicule de diamant ou Vajrayana), sans doute la forme la plus complexe prise par cette religion, qui a intégré à son panthéon, outre les bouddhas et boddhisattvas habituels, toute une floppée de divinités pré-bouddhiques dont la fonction est parfois ardue à comprendre. Sans compter la variabilité des pratiques selon les différents ordres religieux. Bref, il est très compliqué pour un occidental non habitué à cette religion de s'y retrouver. Une exposition telle que celle du musée Guimet, si elle ne lève pas toutes les obscurités, a au moins le mérite de déblayer le terrain et de nous permettre de mieux envisager au moins l'organisation du pays et d'appréhender les divinités bouddhiques et la façon dont on a incorporé par divers artifices théologiques les divinités pré-bouddhiques à ce panthéon incroyablement riche.

A ce titre, il est essentiel de s'attarder sur Padmasambhava. Ce maître bouddhiste a participé à la première diffusion du bouddhisme, au VIIIe s., en particulier dans les zones himalayennes. La légende veut que son oeuvre prosélyte ait permis le passage au Tibet de la religion traditionnelle Bön au bouddhisme. Le Bhoutan ne fait pas exception, avec pour ce pays un mythe singulier narrant son arrivée depuis le Tibet monté sur une tigresse volante jusqu'à Taktshang où il fonda son monastère, à 500 m. en surplomb de Paro. Il aurait aussi provoqué la conversion du pays tout entier et dompté les anciennes divinités maléfiques en les intégrant au panthéon bouddhique afin que désormais elles protègent le pays. Au Bhoutan, ses exploits et sa sagesse lui valent d'être célébré comme un bouddha.

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(Monastère de Taktshang, photo trouvée sur Flickr)

Padmasambhava, fondateur de l'un des deux principaux ordres monastiques du pays, l'ordre Nyingmapa, aurait aussi caché des terma, sorte de trésors spirituels qui peuvent prendre la forme d'objets ou simplement de pensées religieuses destinés à être redécouverts le moment venu par des tertöns (découvreurs de trésors) comme Pema Lingpa (dont est issue la famille royale du Bhoutan).

L'autre personnage majeur de l'histoire bhoutanaise, et à ce titre très fortement vénéré, est le Zhabdrung Ngawang Namgyal (1594-1651). Considéré comme le père de la nation, il a donné au Bhoutan, au XVIIe s., une véritable identité culturelle, distincte de celle du Tibet. C'est également à partir de son règne que l'ordre des Drukpa Kagyupa devient dominant au Bhoutan, jusqu'à donner son nom au pays (Druk Yul = Pays du Dragon).

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(Zhabdrung Ngawang Namgyal, XVIIIe s., Institut bouddhiste de Tango, Timphu)

Comme cette exposition est composée d'objets certes d'une grande valeur historique et artistique, mais qui sont sacrés et servent toujours au culte, le Bhoutan a tenu à ce que deux moines l'accompagnent en permanence. Ils sont ainsi logés au musée Guimet, où ils purifient et bénissent chaque matin la salle d'exposition.

Ils disposent au dernier étage du musée d'une salle aménagée avec un autel à offrandes grâce auquel ils organisent des rituels deux fois par jour, l'un dédié à Padmasambhava, l'autre à Vajrakila et Mahakala.

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(Autel chargé d'offrandes. Photo personnelle)

Au centre, les moines réalisent pendant la durée de l'exposition plusieurs mandalas en sable coloré, chacun étant dédié à une divinité précise (et détruit avant de réaliser le suivant, ce genre de réalisations devant être éphémère).

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(Mandala. Photo personnelle)

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Bravo pour ton article bien documenté et richement illustré qui donne envie d'aller dans un premier temps au musée et plus tard, plus loin, au pays d'origine.
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